Les dessins, même imparfaits, même inachevés, je les offre aux modèles, ils sont une face de la mémoire de leur passage à l'atelier, comme le sont aussi ces quelques mots, ou les images qui restent enfouies et nous reviennent à l'improviste, leur rappelant une séance particulière où nues, elles offraient à mes crayons le bonheur de la découverte et d'une sorte d'introspection partagée…. Et j'aime imaginer qu'un jour, à une époque où l'héritage se fera par transmission de milliers de fichiers que personne ne saura trier et qui, d'un clic, disparaitront à tout jamais, un adolescent fouineur et curieux, découvrira dans une malle fermée réunissant quelques objets épars, une page griffonnée, la dépliera incrédule et découvrant le dessin d'une jeune femme nue posant sur un canapé dira, à sa sœur à ses côtés, regarde, c'est grand-mère, j'en suis sûr….
Quand je leur ai raconté ce désir imaginaire, auquel jamais je n'assisterai, qui ne vit que dans mes rêves immatériels, ils se sont regardé, complices, elle a dit le tableau de Maman, et lui a souri…
Un peu avant je les avais accueilli comme souvent dans la cour les invitant à me suivre jusqu'à la porte de l'atelier... Avec son grand pull et son jean, elle avait l'air d'une adolescente juvénile arrivant du collège, radieuse, curieuse mais pas inquiète... Puis, comme les dentelles remplaçaient les lainages qui passaient au dessus des épaules, la soie le pantalon qui avait glissé le long des cuisses, elle devenait femme fatale et les deux images se superposaient, en voyant l'une je savais l'autre et... je succombais aux deux en même temps... Ah je fus troublé, et si elle était presque nue, son charmant mari et moi même étions masqués, ou du moins au début.... Je commençais mes dessins, un premier croquis, un second, peu à peu je m'effrayais car je ne parvenais pas à saisir sa beauté voluptueuse, sa sensualité, les regards adorateurs de son hommes, l'ambiance de ce moment érotique... Je restais en dehors de la scène, je dessinais mais ne captais pas, comme le photographe qui verrait un magnifique coucher de soleil s'estomper peu à peu et ne parvenant pas à déclencher l'obturateur... car je le sais, même si les poses sont assez courtes, 10 mn environ, elles ne peuvent se répéter à ma seule envie, notre pacte s'inscrit dans un moment fini dont je commençais à voir arriver la limite césure...
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Et puis, dans un mouvement de grâce, elle quitta le fichu canapé ! et se plaça comme une statue sur le tabouret, à la fois nonchalante et fière, et là, elle m'apparut dans son entière féminité, les seins gonflés et débordant généreusement, les fesses cambrées et sa chevelure de lionne lui donnant cette force animale, sans règles, sans protocoles, libre...
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Jeandanslecanapé
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